mercredi 31 décembre 2008

Pour une seconde de rire en plus


Aïe, qu'écrire de fort et de définitif un 31 décembre ? Comment rendre compte de ce passage de Blog An 1 à Blog An 2, tout en profitant de ce bégaiement d'une seconde à 11h 59 mn 59 sec ? Sans oublier les cotillons, les serpentins et les confettis ? Les langues de belle-mère, les petites trompettes en plastique jaune et, merci pour ce pur moment de poésie, les boites à "HEIN ?" Vous savez, l'équivalent ch'ti de la boite à "MEUH ?". Je demandais hier à une consœur du Nord ce qu'elle pensait de ce folklore qui avait secoué de rire a France entière. Pas morte de rire (mdr pour les accros du sms) la consœur, mais pas du tout. Réduire sa région à une baraque à frites et à des tartines de maroille dans la chicorée aurait même tendance à lui sembler réducteur. Ah bon ? Marseille ce n'est pas que Fernandel ? La Normandie, Bourvil et la France, le trio indissociable béret-baguette-gros-qui-tache ? Donc on va essayer d'éviter les caricatures simplistes en 2009. Déjà, le discours "les Ricains, c'est rien que des gros fachos et c'est pas nous qu'on aurait peur de voter pour un Noir" a pris un petit coup avec l'élection de Barack Obama, on va éviter aussi "les Allemands c'est rien que des...." , "les Ritals, des..." etc. On va essayer de garder les yeux et l'esprit ouverts. C'est mieux pour se laisser surprendre, ce qui reste le meilleur de tout voyage. La rencontre inattendue. Le rire partagé comme à cette extraordinaire séance de photos dans le Séchuan : une troupe de vieilles Chinoises (mdr !), qui venaient de grimper au sommet de l'Emei-shan. Avec leurs cheveux coupés court et leur pyjama bleu, on aurait dit de drôles de petits garçons ridés, enchantées de parvenir enfin au but de leur pélerinage qu'elles avaient entrepris depuis des semaines. Ma taille les fit tellement rire qu'elles voulurent poser avec moi. Mon photographe proposa avec galanterie que je m'asseye sur une rambarde pour que ma tête soit à la même hauteur que les leurs, mais elles refusèrent avec véhémence, pour le plaisir de se blottir contre moi comme des petites filles, en pouffant. Et comme je riais aussi, elles en profitèrent pour demander à voir mon cahier de notes car, si nous sommes fascinés par leurs idéogrammes, les Chinois trouvent notre écriture de toute beauté. L'une finit par écrire sur une page avec mon stylo qu'elle m'invitait à venir passer des vacances dans son village natal. C'est notre guide-interprète, Li dit Nicolas, qui me fit la traduction et je l'en remerciai dans mon meilleur mandarin ce qui déchaîna une nouvelle salve de rires. Par la suite, Li m'expliqua gentiment qu'au lieu de dire "merci" j'avais plus ou moins articulé quelque chose comme "tarte au potiron".

vendredi 26 décembre 2008

Attention : joyeux Noël !


Peut-être vais-je utiliser ce tableau pour signaler les vrais moments de bonheur. J'en aime la lumière et la douceur. La main qui l'a créé aussi, bien sûr. Rien de trop vif, juste des roses jaunes qui ont fait le plein de soleil en fin de journée. Ce soleil qui réchauffe les couleurs et adoucie les ombres. Avant-hier, je répandais une brassée d'œillets d'Inde sur ce blog pour ce jaune d'or qui efface la mélancolie et hier, je recevais cette toile... Je n'en ai pas encore choisi la place mais, pour l'instant, elle trône dans ma bibliothèque et me réchauffe. Cliquez dessus, vous comprendrez !

mercredi 24 décembre 2008

Noël


Pas facile Noël ! Pas facile la joie de se retrouver en famille, pas immédiate en tous cas. On a tous des souvenirs de Noëls terribles. Ce matin, une amie, qui signe Chabada Bada quand elle zone sur ce blog, me conseillait la bûche farcie au Valium, après la dinde farcie aux marrons. C'est juste histoire de faire un mot mais quand même... Cette année donc, je vais me concentrer sur tous ceux qui me font chaud au cœur. Dans le désordre, ma famille, mes ami(e)s, ces photographes avec qui je pars en reportage, avec qui je partage des fous-rires, des épuisements, des rencontres, François avec qui je n'arrive pas à travailler, mais nous n'avons pas dit notre dernier mot, Patrick avec qui je bois des seabreezes et des mojitos dans cet hémisphère ou l'autre, Jean-Michel qui m'a accompagnée en Inde et laisse des petits mots comme des cailloux blancs dans mon répondeur, mais aussi Pierre-Marie, l'architecte d'intérieur surmené avec je finirai bien par écrire un livre, Sylvie, Annik et toutes les autres, celles qui ne sont jamais loin de mon portable ou de mes mails. Je pourrais mettre une photo de cette vaillante troupe mais je vais plutôt exprimer ma gratitude à l'indienne, avec ces fleurs couleur de soleil illuminant la cour d'une forteresse à Maheshwar. Cliquez sur la photo, c'est magnifique. Merci. Dhanyavad.

samedi 20 décembre 2008

T'as voulu voir Gisors...


...ou l'aventure est au coin du Vexin ! Balade tout à fait exotique et charmante dans les environs de Paris pour dénicher des chambres d'hôtes de charme. J'adore cette dénomination "de charme" qui veut dire que cela doit ressembler à un reportage dans un magazine de déco : bois lavé, flotté, béton ciré, mur chaulé, Louis XVI tendance gustavienne, un petit bouquet de fleurs pâles aux pétales abondants et chiffonnés, genre rose ancienne, un boutis peut-être. Des bottes de caoutchouc et un vieux chapeau achèveront la touche romantico-Côté-Ouest. On ira même jusqu'au haveneau si on est au bord de la mer, la vraie, pas la Méditerranée. Bref, départ pour, en vrac, Dreux, Chartres, Nogent-le-Rotrou, Chateaudun, Alençon et découverte d'endroits où l'on s'imagine sans peine passer un week-end, à deux, ou avec des enfants. En vedette, le Perche, un enchantement tant cette région est sauvegardée, protégée de ces verrues de béton que sont les petits lotissements minables sortis tout droit d'une boite de Playmobil. Ou de l'imagination à marée basse d'urbanistes plus affairistes que talentueux. Ici la campagne n'est pas mitée, les prés suivent collines et vallons jusqu'à des villages exquis aux toîts de tuiles anciennes. Il y a des troupeaux à l'ombre des arbres et au creux des haies, des chevaux, percherons ou pas, des églises qui carillonnent et des vrais marchés. Et encore, j'y étais au pire moment de l'année, fin décembre, quand les arbres sont nus et les seules fleurs, des achillées desséchées. Donc bonheur, dans le pré bien sûr, et retour programmé après trois jours de balade, à partir de Gisors. un petit Gisors-Paris-St-Lazare, gare presque fictive qui ne dessert plus que la banlieue. Banlieue, c'est ça, j'étais à des années-lumière de la foule du boulevard Haussmann avant Noël mais ce n'était finalement que la banlieue, magique non ? Sauf que tous les trains pour Paris étaient supprimés. Mouvement social pour cause de "cadencement" et "merci de votre compréhension". Ma compréhension ? Mais certainement pas ! Je veux rentrer. C'est où Paris ? Il est 5h, la nuit est déjà tombée et une petite bruine glace Gisors et les guirlandes tremblotantes sur la place de la gare. Non je ne veux pas dormir à l'hôtel Moderne en attendant la fin de la grève. Je déteste les grévistes et Gisors dont je ne connaitrai que la panneau d'affichage des trains supprimés. Soixante euros de taxi plus tard, je parvenais à Cergy-Pontoise où beaucoup de RER de la ligne A étaient supprimés aussi, pour une raison inconnue, mais "merci de votre compréhension". Course après le distributeur de billets en état de marche sur un parvis balayé par les vents et les voitures de police, bagarre pour ne pas être écrasée moi et ma valise à partir de Nanterre-Préfecture mais finalement Paris au bout du tunnel. En tout rien de grave, surtout une fois, par hasard, en passant par le Vexin, mais un spleen intolérable devenant un vrai enfer au quotidien : "Quand la terre est changée en un cachot humide, Où l'Espérance, comme une chauve-souris, S'en va battant les murs de son aile timide Et se cognant la tête à des plafonds pourris..."

vendredi 12 décembre 2008

Lost in Translation (2)


Je me souviens d'un soir de janvier, à St Pétersbourg, au Grrrrand Hotel Eurrrope Kempinski. Il faisait un froid de loup et mon photographe n'était pas encore arrivé de Moscou. La perspective de dîner seule dans une immense salle à manger où une harpiste en robe longue assurait l'ambiance pour une foule de semi-alcooliques, m'avait poussée à choisir le restaurant italien. Légèreté, soleil, bonne humeur et pâtes, quel bonheur ! Au bout du fond du rez-de-chaussée, je trouvais une autre immense salle à manger, mais rouge celle-là, avec un décor de grappes de raisin de plastique enroulées à des treilles assorties. Là, pas de foule. Ce n'était pas le genre vodka-caviar à volonté et je fus escortée par le maître d'hôtel à une table en plein milieu, d'où il apparaissait clairement que j'étais seule à aimer les pâtes. Complètement défaite, je passai mon repas à me débattre avec des spaghetti bolognese trop cuits, le nez dans mon assiette pour ne pas croiser le regard du musicien, un gros Russe congestionné, déguisé en gondolier qui "exécutait" O Sole Mio à la balalaika à un mètre de moi.

Le Japon, île majuscule


Hier soir, Lost in Translation sur Arte que je n’avais pas vu. Cela m’a rappelé tout ce que j’ai trouvé d’ingrat au Japon, cette impression asphyxiante d’être redevenu un tout petit enfant qui ne sait rien faire tout seul. Qui n’a plus aucune prise sur le monde qui l’entoure. Comme un nourrisson qui attend tout de sa mère. Je ne sais pas si j’ai jamais aimé ce sentiment d’impuissance absolue mais à l’âge adulte, c’est insupportable. Et pourtant, je ne suis pas allée à Tokyo, dans cet univers inhumain que nous montre Sofia Coppola avec un rien de malice. J’étais à Kyoto, le rêve de tout voyageur. Kyoto au printemps, à l’époque bénie des sakura, quand les Japonais s’enivrent de la beauté des fleurs de cerisiers, quand ils revêtent leurs plus beaux habits pour les mériter, quand ils se prennent en photos sous les branches des espèces pleureuses comme ils l’ont fait au millimètre près l’année précédente, et celles d’avant encore. Entre cet exercice de poésie pure où toute une nation se retrouve pour fêter les fragiles corolles blanches et roses, et la vulgarité des pachinko où les mêmes viennent jouer aux machines à sous dans des hangars de tôle ondulée, le visiteur a un peu de mal à comprendre. D’un côté, on cherche sur internet le degré d’éclosion des fleurs le long du canal de Takasegawa, ou au temple de Kyomizu, de l’autre on s’abîme dans un tête à tête exorbité avec un bandit manchot qui lâche des pétarades et des flashes lumineux à rendre cinglé Lao Tseu lui-même ! Des gamines sans âge aux jambes blêmes s’habillent comme des poupées Corolle géantes pour mieux dealer leurs petites culottes. Les garçons s’inventent un look de rockeur à coup de gel. "Téléphone maison ", comme suppliait E.T. Une image du film résume bien l’esprit des voyages et la détresse qui submerge parfois : Bill Murray assis au bord de son lit d’hôtel, le regard perdu, comme ce tableau de Hopper où une jeune femme est assise sur son lit ouvert, quelque part, à New-York sans doute.

jeudi 4 décembre 2008

Shame and Scandal





in the family ! Vous connaissez le refrain de l’adaptation en français par Sacha Distel : « Ton père n’est pas ton père mais ton père ne l’sait pas ». On voit que c’était 1) à Trinidad 2) dans les années 60, parce qu’aujourd’hui ce n’est ni une honte, ni un scandale. C’est même parfaitement normal. La preuve ? Les livres pour enfants avec des vrais sujets de société pour qu’ils apprennent tout de suite les règles du jeu. Chouette, mes parents divorcent ! Youpee, Papa est homosexuel ! Génial, Maman est zoophile ! Super, Mamy se pique ! Le tout est de ne pas être « normatif ». Oui, c’est vrai, Papy a un petit commerce de shit dans les caves de l’immeuble, so what ? Dehors, il fait froid, ce n’est pas la peine de risquer des engelures. Le dernier sujet brûlant à dédramatiser très vite était dans ELLE : Ma Maman, c’est mon papa, et j’ai grandi dans son ventre. Oui il ressemble à Régis Laspallès avec un collier de barbe de professeur des écoles (non, pas un instit, justement pas ), oui, il a des cicatrices sous le seins parce qu’il a fallu les lui enlever, oui, il a le même gros ventre que Demi Moore photographiée par Annie Leibowitz… Maman ? je ne sais plus à quoi elle ressemble : Laspallès enceint m’a un peu grillé les neurones. A Bigard peut-être, ou à la Schtroumpfette, je n’en ai aucune idée. Toujours est-il que cela fera un beau sujet de livre pour enfants, avec, non pas de jolies illustrations, mais des collages impactants. Les jolies illustrations qui faisaient rêver, c'est nul. Niais. Mièvre. Les enfants aiment bien ? C'est nul. Il est joli le monde ? Non, bon alors. Donnons leur tout de suite les outils nécessaires à une vie in the moule pas gai. Gai ? Quoi "gai" ? C'est une allusion à l'homoparentalité ? Attention, prudence, Act Up et la Halde sont tapis dans l'espace et le cyber- pour éviter toute humiliation aux caniches homosexuels et aux pinsons de couleur. Big Brother n'est pas ce qu'Orwell croyait. Enfin, pas seulement. Au risque d'un exécution sur Facebook (non, je n'y suis pas), je vous laisse ces illustrations de Kay Nielsen : histoire de rêver tant que l'on n'a pas de puce implantée dans le cerveau pour nous en empêcher.