samedi 28 février 2009

Douce France



Balade dans la France plutôt profonde à la poursuite de la chambre d'hôtes idéale. Entre Orléans et Vendôme, grande boucle au sud de Châteauroux, non loin de l'Allier et de la Creuse, et rencontre de quelques Français qui ont un jour décidé de changer de vie. Ce qui est assez fascinant. Il y a Maria, ancienne cadre sup dans une multinationale, très bien payée, mais qui ne voyait ses deux enfants qu'endormis, tôt le matin et tard le soir. Un jour, elle et son mari ont trouvé qu'ils passaient très certainement à côté de quelque chose et ils ont quitté Paris, le salaire coquet et la sécurité. Depuis, elle est là à la sortie des classes et s'occupe de recevoir des hôtes dans sa jolie maison Art déco avec talent et enthousiasme. Un jour, son petit garçon lui a soufflé gentiment : "Tu sais, avant, on vous connaissait pas beaucoup, Papa et toi". No comment.

vendredi 20 février 2009

Esculape, me voilà !

Les médecins ont une curieuse (fâcheuse) tendance à prendre leurs malades (patients, clients) pour des délinquants et/ou des débiles. Et d'une certaine manière, cela m'amuse beaucoup. Jusqu'à un certain point car il m'est arrivée de perdre un peu de cette zenitude boddhisattvesque qui est une de mes postures favorites. Certains s'aiment intraitables, avec un caractère de chien, moi j'ai une faiblesse pour cette image über-cool conquise de haute lutte le long d'une existence...etc Bref, le jour où ce crétin d'homéopathe mollement tripoteur m'a dit, en réponse à mes interroragtions sur une abominable fatigue qui ne cessait jamais :"Mettez un peu d'ordre dans votre crâne et cela ira mieux", alors que, je l'ai appris plus tard, je souffrais d'une apnée du sommeil qui me réveillait toutes les 3mn, j'ai failli retourner le voir et lui mettre deux claques pour tant d'arrogance pseudo-psy. Donc, le dernier en date va s'occuper d'essayer de me faire perdre 5kg et plus si affinités. Il m'a parlé pendant une heure de ce qu'il allait faire, et surtout moi, sur le ton didactique que l'on réserve aux délicieuses idiotes qui se goinfrent de pâtisseries, de sodas et autre horreurs diététiques. Pourtant je lui avais expliqué mon parcours d'experte en oméga 3, fruits, légumes et céréales bio, viande blanche et poissons gras, spiruline et curcuma... Tant pis ! Mais c'était assez gentil et il essayait vraiment de prendre en considération mon mode de vie, mes déplacements, mes décalages horaires et tout ce qui fait que mon cas est proche du désespéré ! Qui vivra verra, sauf les aveugles qui vivront sans verront, comme disait Desproges.

mercredi 18 février 2009

Faits div'

Il y a deux ou trois ans, les journaux racontaient l'histoire invraisembable d'une famille d'Orléans ou de Tours, une ville paisible des bords de Loire, où les enfants, scolarisés, vivaient, plus ou moins nus, dans l'appartement familial, avec les chiens et les détritus. Pas de lit, pas de cuisine, ni de toilettes, un retour à la caverne si ce n'est, trônant au milieu des cartons éventrés, des boites de conserve et des crottes de chiens, et plus si affinités, un sublimissime écran plat, dernier cri de la technologie qui avait dû engouffrer toutes les allocs de l'année plus le RMI. A l'époque, j'avais trouvé dans ce détail un raccourci saisissant de notre société et aujourd'hui, alors que le pouvoir d'achat est au centre des préoccupations et que je reviens d'Inde, ce fait divers me revient en mémoire. Là-bas, j'ai lu la maxime suivante : High thinking and low living is the ultimate goal of human life, ou quelque chose de ce genre. Nous avons fini par tout faire à l'envers, nous complaire dans une effarante nullité intellectuelle et humaine et nous gaver de biens de consommation. Quoi de plus consternant qu'une soirée devant une émission de Delarue, Dechavane, Sébastien, Cauet et tant d'autres, sur un écran plasma dont la résolution parfaite nous permet de plonger dans le vide sidéral de leur regard fat ? Et le pire est que, si nous n'avons pas ce fameux écran plat, nous avons l'impression d'être les laissés pour compte de la "civilisation".

dimanche 15 février 2009

Baby-boomers


Comme d'habitude, je les retrouve devant le tapis roulant qui livre les bagages. Ils ont toujours le même air rigolard, le bronzage qui fait l'œil de chouette, le bout du nez qui pêle et la plaisanterie facile. Ils reviennent toujours de Bangkok avec une ou deux escales improbables car leur TO (tour opérateur) a des accords avec Sri Lankan Airways ou Turkmène-mon-amour.com. Ce sont les derniers (et peut-être les seuls) profiteurs du système, les joyeux retraités de la Fonction Publique qui "font" la Casamance, Phuket, Maurice et Machu Picchu entre potes. Tandis que je scrute l'ouverture béante censée me vomir ma valise, ils s'envoient des vannes "Ouaaah, la tête de Jocelyne quand Robert et Manu ont mis un caméléon dans sa pina colada ! Pas vrai, Joss ?- Ben dis donc, tu t'es pas vu gerber tes criquets en gelée, hein ?". Ils sont en Birkenstock ou en baskets, portent des lunettes Varilux d'Essilor qui leur font de gros yeux de batraciens, un gilet en polaire et un petit sac à dos. Ce sont des baroudeurs. Leurs modèles sont les héros de Koh Lanta et les femmes se reconnaissent aussi à leur nuque rase pour ne pas donner prise aux tarentules. "Bon, on s'rappelle avant la prochaine expé ?". Bisous.

vendredi 13 février 2009

Long time, no see...


Retour d'Inde dont je parlerai plus. Mais peut-être pas mieux. Non tout d'abord, je voulais remarquer que l'on a inventé un tribunal pour condamner les crimes contre l'humanité mais je pense qu'il faudrait faire quelque chose pour punir les "mini-crimes". Pas au tribunal de La Haye, mais peut-être à celui de La Hague ou de l'Haÿ- les-Roses, pour l'inventeur du petit arbre de Noël en carton imbibé "Senteur noix de coco" accroché au rétroviseur de certains chauffeurs de taxi en mal d'exotisme. Un ingénieur suisse je crois, ou allemand, qui confond le souffle embaumé des alizés avec les vapeurs méphitiques d'une usine chimique. En deuxième, comme ça, j'enverrai l'abruti qui a mis au point, mais ils doivent être plusieurs, la casquette américaine. Celle qui ne parvient pas à donner à Barack l'air d'un crétin total mais pas loin, et complétait si exactement le regard habité de George W. D'où je viens, les femmes ont la grâce que nous avons souvent perdue. Elles surgissent d'un horizon de fumées âcres de décharge, comme une apparition céleste, la démarche souveraine dans leur sari de couleurs vives, effleurant à peine le sol boueux. L'an dernier, à Maheshwar, premier coup de semonce, une femme dans un temple, drapée dans la mousseline vert anis, la casquette enfoncée au ras des sourcils pour faire ses dévotions. "Comme une verrue sur le visage d'un ami cher", dirai-je en citant Charles, prince de Galles, qui parlait de l'extension de la National Gallery à Londres. Cette année, dans le Karnataka, j'ai eu l'occasion de croiser le chemin de touristes indiens et cela se confirme : l'homo touristicus choisit toujours la panoplie du parfait blaireau, sous toutes les latitudes. Il y avait ce couple, ni beau, ni laid, lui avec son petit physique d'employé de banque, la casquette Nike, le polo Ralph Lauren avec un logo si gros sur le côté gauche qu'il en paraissait lourd et un sac en badoulière Prada, et elle, en mules à talons pour visiter la plantation de café détrempée par la pluie, le pantalon en acrylique, la blouse mollasse avec des froufrous et la casquette rouge, frappée de de la croix blanche et suisse. Elle faisait la gueule comme Paris Hilton, avec son petit bedon et ses bijoux clinquants. Je me rappelais de Bernadette Folavoine, avec qui j'avais fait un stage et qui avait donné son cœur, que dis-je, sa vie, à l'industrie du pétrole. "Voyez-vous Paquita, quand j'étais jeune, en Normandie, les femmes mettaient leur plus belle coiffe pour aller à la messe. Amidonnée, tuyautée. C'était ravissant. maintenant, elles s'habillent aux Dames de France, comme vous et moi, et ressemblent juste à des petites vieilles !" D'accord, je ne me suis jamais habillée aux Dames de France, mais elle avait raison et ce petit cageot à moustache ressemblait juste à un petit cageot à moustache !

dimanche 1 février 2009

"Reviens, reviens", criait la trompe !


"... et alors, le loup la mangea !" Je me demande si la tragique histoire de la chèvre de Monsieur Seguin ne conditionne pas mon inéluctable crisette d'anxiété avant chaque départ en reportage. Là je me prépare à un voyage sublime dans le sud de l'Inde, le Karnataka, que je ne connais pas et qui a une magie absolue à mes yeux, l'encens. L'encens de Mysore. Les mots seuls font rêver. J'ai gardé des souvenirs éblouis d'Oman à cause des sillages de parfum qui signalent le passage des femmes, à cause de ces braseros dans les lobbies des hôtels qui leur ôtent toute banalité internationale. Donc Mysore, après Bangalore et Colombo. Ensuite quelques temples et sanctuaires, et des parcs nationaux où admirer des troupeaux d'éléphants. Que du bonheur, non ? Pourtant, j'ai presque envie de me mettre dans un coin pour sucer mon pouce. J'ai dit "presque".
J'ai d'abord pensé que c'était le souvenir des départs en vacances avec mes parents, quand mon père remontait vérifier le gaz et/ou l'électricité cinq fois, où ma mère était si énervée qu'elle en oubliait sa réserve habituelle pour le houspiller. Mais, en fait, je suis devenue une telle pro du départ, de la valise, du passeport, des bouteilles de 100ml, pas plus, dans un petit sac en plastique, de l'enregistrement toute seule, comme une grande, à une "borne" ad hoc, du cadenas ouvrable par les douanes US, des escales improbables, que plus rien ne peut vraiment me surprendre. C'est donc la peur de quitter la maison et de me faire manger. Comme cette pauvre Blanchette, ou le Petit Chaperon Rouge, ou toutes celles qui sont parties à l'aventure en croyant que c'était une bonne idée. Je ne sais pas si les ex-petits garçons ont cette même angoisse...