jeudi 27 novembre 2008

Squelette ou hexosquelette ?

Télescopage étrange : en sortant, je croise un être pathétique, une jeune femme peut-être ou une vieille dame ou un têtard, quelque chose qui a des pattes grosses comme mon poignet, des articulations qui, par contraste, semblent gonflées, un corps inexistant, le tout surmonté d'une bizarre tête sous un bonnet de laine jaune pour affronter la Sibérie en janvier, des yeux cachés sous des lunettes de soleil immenses et deux gros trous de nez. Elle avance par à-coups sur le boulevard, comme une argyronète sur une mare, en lévitation ou presque tant ses jambes sans la moindre chair autour de l'os, ont l'air fragile dans ses collants noirs. Et ce soir, on m'appelle pour me donner l'adresse d'un cabinet d'esthétique qui, à prix d'or, s'occupe de fusiller les capitons...

jeudi 20 novembre 2008

"Rogntudju" comme disait Franquin


Lorsque j'étais à Londres, je suis tombée sur ce T-shirt qui, je pense, va me servir beaucoup. Non, pas le T-shirt lui-même, mais sa photo. Ce sera l'avertissement au blogger du genre "attention, je grogne, je grommelle, je râle, je bougonne, je m'insurge, je m'indigne, je proteste... et tant pis si cela fait vieille conne, j'assume!" Tout ça parce que je reviens des journées Européennes du Développement à Strasbourg et que ce que j'y ai vu m'a affligée. Non pas Strasbourg que j'adore mais les sus-évoquées JED. Entre fêtes de patronage et tu-as-vu-comment-je-le-sauve-le-monde-moi-? avec quelques huiles ravies de se voir si belles dans les yeux des pauvres reconnaissants et des zillions de fonctionnaires venus se goberger au frais du développement. On avait coupé des arbres par centaines pour éditer des prospectus en papier glacé, des livres de photos somptueux (italiens bien sûr, sur le Darfur) et des dossiers où chacun se fait mousser. Le kérosène et le champagne coulaient à flôts, on hésitait entre les huîtres et les Saint-Jacques, le capuccino de truffe et le gazpacho de potimarron, Mon Dieu que la misère était belle ! J'ai voulu voir ce qu'il y avait en matière de commerce équitable et de tourisme responsable, ou éthique, ou l'inverse. Là, loin de l'orgueilleux palais des Congrès, en pleine terra incognita alsacienne où les fonctionnaires ne s'aventuraient pas, j'ai trouvé quelques comptoirs de bidules bricolés, genre petit-gilet-pour-descendre-la poubelle du Père Noël est une ordure. Pourquoi faut-il que les bonnes actions soient moches ? Pourquoi ces vêtements orange, marron et caca d'oie ? Pourquoi cet artisanat de merde sous prétexte que l'on va aider les femmes ouzbek ? Faut-il vraiment faire pitié pour mériter que l'on se penche sur votre misère ? Il y a des artisanats merveilleux partout, j'en vois à chaque voyage et je craque, non pas pour me sentir aussi bonne qu'une dame d'œuvre à l'ancienne, mais parce que c'est beau, que j'adore les bijoux perlés d'Afrique du sud, les parures touareg, les vestes tibétaines, les tuniques brodées indiennes... Pas vous ?

jeudi 13 novembre 2008

Du pain et des jeux

La ville de Londres regrette de s'être battue férocement pour organiser les JO en je-ne-sais-quelle année parce que cela va coûter 11 milliards d'euros. Onze milliards pour bâtir des stades obligatoirement "architecturalement décapants", dont personne ne se servira une fois les jeux terminés, des villages olympiques moches, des échangeurs d'autoroutes hideux, sans parler de la marée de blaireaux qui déferlera et de l'armée qui surveillera chaque station de métro, chaque compétition de courses-en-sac-poker-tiramisu. Merci Delanoë d'avoir été bêtement optimiste, voire arrogant ! Merci d'avoir été recalé ! Avec les couloirs de bus de la peur, on aurait pu inventer une nouvelle discipline : la traversée du carrefour de Port-Royal ou des Gobelins un jour de grève des feux tricolores.

mercredi 5 novembre 2008

Merci Barack


Temps de merde sur Milan mais on s'en fout : Obama est elu. Je vais repartir dans les bourrasques avec mon stylo entre les dents (finalement c'est une image assez realiste de ce metier), mon parapluie coince entre ma clavicule et mon oreille. Je reviendrai ce soir comme un chien mouille, mais pas un "vieux chien". Merci Barack. On va pouvoir aimer a nouveau les Etats Unis tranquillement sans s'excuser, sans devoir expliquer que TOUS les Americains ne sont pas des rednecks incultes.

mardi 4 novembre 2008

Acqua alta...


J'essaie de trouver Milan a mon gout, m'extasiant in petto devant les jolies cours que j'apercoie au dela des portes et des grilles. Il semble qu'il y ait une vie derriere ces murs gris et severes mais, malgre tous mes efforts, la lutte contre les bourrasques, le parapluie dans le meme main que le cahier pour prendre des notes, tout en tenant le plan qui se dechire et le stylo entre les dents m'ont minee. Je rentre epuisee et trempee comme un vieux chien. "Vieux chien", faut-il que cette foutue ville me deprime, c'est la premiere fois que je me vois en "vieux chien". Le clavier local de l'ordi qui me prive d'accents et de cedilles renforce mon desespoir canin. Meme l'idee d'un bichon frise mouille avec un stylo entre les dents ne me fait pas rire alors que j'ai le souvenir imperissable d'un "bichon frise" (avec l'accent anglais please !) dans un "dog-o-matic" a Miami : il ressemblait a un nuage, une barbe a papa, prete a s'envoler sous le souffle chaud d'un sechoir a frisure. Mais je ne suis pas frisee...

lundi 3 novembre 2008

Que fait la police ?

Ce matin, j'entends sur RTL que l'Allier, la Loire et d'autres débordent et inondent des villages. Une habitante de Rive de Gier, sur le Gier, bien connu micro-affluent du Rhône, s'emporte contre les "politiciens" qui "devraient faire quelque chose". Quoi donc ? Prendre une serpillère et un seau ? Barrer la route à l'eau avec leurs petits bras ? Voter une loi interdisant aux rivières de quitter leur lit ? La France est sans doute le seul pays où l'on attend que l'Etat intervienne quand il fait trop chaud, trop sec, trop mouillé, trop venteux. Où l'on est prêt à faire un procès à Météo France qui n'a pas prévu que la grêle allait hâcher menu les mirabelles, que la neige allait peser trop lourd sur les caténaires, qu'il allait faire froid au péage de St-Arnoult ... et les pompiers n'ont même pas eu la grâce d'apporter des soupes chaudes et des couvertures de survie aux automobilistes. Et que l'on ne vienne pas me taxer de laisser-faire ultra-libéraliste, c'est juste que ce serait bien de quitter la maternelle pour entrer à la grande école, non ?

dimanche 2 novembre 2008

Londres (suite)


Déjeuner au Golden Hind, le "meilleur Fish'n'chips" de Londres, bizarrement tenu par des Grecs qui s'agitaient sous la bénédiction d'une icône de Saint Georges, plastifiée j'espère pour ne pas disparaître sous la graisse pulvérisée de ce temple du graillon. Ce que le dragon a raté, le fish'n'chips l'a réussi. Bon, j'exagère mais eux aussi, c'était un bon fish'n'chips mais j'en ai dégusté un bien meilleur à NYC, dans un bouibouis en bord de l'Hudson. Les chips étaient bien mais, comme l'a remarqué notre voisin, natif du Yorkshire, le poisson était un peu mou, genre "nourriture d'hôpital", pas assez saisi et surtout pas dans de la graisse de bœuf... Il y avait là des traders français comme toujours, mais cette fois le moral était bas. Je n'ai pas remarqué s'ils portaient des chemises blanches, comme l'a écrit la Tribune, en signe de deuil parce que cette année no bonus, nada, niente, zilch ! Mais leur sourire de loup s'était envolé. On sentait que ceux-là en tout cas n'avaient pas misé à la baisse comme certains l'ont fait, qui empocheront une belle prime bien grasse. Ils n'étaient pas non plus à la rue, que l'on se rassure, mais brutalement Londres avait perdu beaucoup de son charme et tous parlaient de "cette ville" à laquelle ils n'avaient jamais pu se faire. Allo Maman bobo ? Et cela m'a fait rire devant mon haddock pas assez croquant.