mercredi 6 mai 2009

Mon beau tatoué


Une des recherches les plus absurdes, et les moins productives, de mon reportage à Moorea, a été la course aux tatoueurs. Comme je l'avais lu et comme on me l'a confirmé sur place, le tatouage fait partie des revendications identitaires fortes des Polynésiens, avec la pratique de la langue reo ma'ohi et de la danse. Surtout dans des îles soumises à la règle française de la centralisation et du nivellement par Nos ancêtres les Gaulois, après le passage des missionnaires protestants qui les avaient dissimulés sous des housses en tissu de rideau pour oublier toute lascivité condamnable ! Donc je voulais rencontrer quelques uns de ceux qui ont refait de l'île un haut lieu du tatouage et qu'ils m'en parlent. Tout a commencé par Taniera, sorte de grande araignée volubile et confuse, qui passait des considérations les plus enfumées (et je pèse mes mots) à des fulgurances que j'attrapais au vol et notais en vrac sur mon cahier. Ce qui l'intéressait surtout était de savoir si j'aimerais me faire tatouer et où, car l'emplacement est important. Ayant cette idée en horreur mais comme il avait lui-même un tatouage à la base du pouce gauche, je prétendais être tentée par la base du pouce droit (nous étions en face l'un de l'autre). Après m'avoir entraînée à l'écart, il me raconta alors l'histoire de sa mère, morte dans son sommeil alors qu'il dormait contre elle et de cette douleur infinie qui l'avait saisi à cet endroit précis, là où elle lui tenait toujours la main, au moment précis où elle s'était éteinte. Ce qu'il ne réalisa que plus tard. Et ce tatouage qu'il avait transformé au fil des années pour le rendre plus banal, lui rappelait qu'il n'allait jamais sur sa tombe. "On me dit "elle est jolie ta raie" et je pense que je ne vais jamais la voir".

1 commentaire:

berthe a dit…

ton tatoué t'as t'il oté ta toux ?